Hier, après un échange intéressant avec Loïc, je me suis souvenu que l’on me faisait souvent remarquer que je ne suis pas un pro kimono et pire encore, que je n’aime pas le gi. Clairement, cela fait près de 25 ans que je pratique le Jiu-Jitsu et il est vrai que ce n’est pas ma passion en termes de combat. J’y suis arrivé en tant que karateka pratiquant le Pancrase pour améliorer mon combat libre. Je me souviens à quel point le kimono me semblait inintéressant et dénué de toute cohérence par rapport à une logique de MMA. Pour moi le kimono est trop éloigné du combat, par contre c’est un jeu amusant.
Je lançais des heel hooks à peu près comme tous les combattants de l’époque et je ne faisais que me faire réprimander. Ce qui me frustrait, c’était de croire que le Jiu-Jitsu était un art souple alors que je ne ressentais que de la force à travers les prises. Aucune des techniques ne passait en randori, autant dire que je revenais très vite aux clés de jambes.
De plus, mon parcours en BJJ n’a pas été simple, j’ai été plus autodidacte qu’élève. Après ma ceinture bleue remise par Orla, j’ai dû m’entraîner en gi, seul ou en passant voir des potes et en adaptant avec la Luta Livre que je travaillais avec Flavio Peroba. Je n’ai obtenu ma ceinture noire que parce que je réussissais à battre des Jiu-Jitsukas de rang supérieur en randori.
Autant dire que mon Jiu-Jitsu en gi est fortement influencé par la Luta et mes rencontres lors de séminaires, ainsi que par l’apprentissage à travers des livres et des vidéos. Cela peut expliquer pourquoi je ne suis pas réellement fan du combat en BJJ. Je trouve que cela bloque, que ce n’est pas fluide. Les grips et les nœuds sont trop prédominants et peuvent gâcher les combats.
Cependant, j’ai eu la chance d’enseigner dans ma propre section de Jiu-Jitsu et de Luta Livre depuis 2011. Auparavant, je donnais déjà des cours de grappling depuis 2007 dans un cours de MMA (au NBF). Comme je souhaitais proposer une réelle différence entre la Luta et le Jiu-Jitsu, j’ai dû cogiter (et je continue) sur l’enseignement.
C’est là que j’ai retrouvé un grand plaisir avec le kimono. Je pense que pédagogiquement, le gi, avec ses prises, ses angles et ses différentes possibilités, offre plus d’outils pour l’enseignement. Je trouve même que lors des randoris (je ne parle pas des combats « durs » en compétition), les grips et la possibilité de gérer plus « facilement » les distances offrent plus de temps pour mettre en place une stratégie.
Je me suis rendu compte que même si certains de mes élèves préfèrent la Luta, ils progressent très bien grâce au Jiu-Jitsu et je pense que c’est vraiment lié aux rythmes et à la possibilité de se concentrer sur des étapes, alors qu’en nogi, ils compensent davantage avec leurs aptitudes physiques.
En compétition, pour moi, il n’y a pas photo. Le gi m’ennuie vraiment. Surtout dans la catégorie Sumo. Soyons honnêtes, à moins d’être Victor Hugo ou d’avoir des styles à la Buchecha, ce n’est pas particulièrement subtil et la force et les grips deviennent rapidement bloquantes (comme en Judo poids lourd). En grappling, le fait d’être plus mobile et glissant ouvre des opportunités, des sorties et des attaques (qui sont moins assurées qu’en gi). Il y a aussi mon état d’esprit de combattant MMA où je pense toujours aux frappes dans ma vision du sol. Cela fait que de nombreuses positions en Jiu-Jitsu, en particulier avec les lapels, les fifty-fifty, spider, Lasso, etc., me donnent l’impression d’être irréalistes dans un combat « réel ».
Je suis favorable au Jiu-Jitsu sportif, je pense que la compétition est positive. Néanmoins, au dojo, je ne veux pas suivre les logiques de l’IBJJF. Mes ceintures blanches peuvent faire des heel hooks ou des clés de cou et personne ne se blesse. Je ne leur parle pas de points (sauf pour les rares qui veulent participer en compétition) et j’inclus toujours du travail en tachi-waza.
Le Jiu-Jitsu est une superbe discipline, elle a évolué ces dernières années grâce au nombre de pratiquants, à la diffusion d’informations et au niveau incroyable du côté sportif. Je pense que je reste parfois plus critique envers le monde du gi, parce que je suis imprégné du MMA et bien sûr de la propagande Lutadorienne du XXe siècle. Je suis un fan de Jiu-Jitsu grâce à Royce, pour moi, cette école représente cette idée, une discipline qui peut poser de beaux défis en interstyle sans avoir à frapper.
Et vous, qu’aimez-vous plus ou moins dans le Jiu-Jitsu ?
Ne prenez ce qui est bon et juste pour vous. Be one
Pank
